Interview de Sylvain Machac jouant TAHA
Depuis presque quatre ans, Sylvain Machac partage les mots et l’histoire du poète palestinien Taha Muhammad Ali dans un spectacle à l’allure d’un conte oriental.

« TAHA c’est le symbole de l’homme qui se transforme grâce à la poésie »
Comédien de formation ayant joué notamment aux côtés de Michel Bouquet, producteur et fondateur de la compagnie Arum, il découvre Taha à la suite d’un concours de circonstances. S’inspirant du spectacle originel écrit par le dramaturge palestinien Amer Hlelel, il jouera la version francophone le jeudi 20 mars prochain au Palace. Contacté, il nous raconte la genèse de l’adaptation du spectacle palestinien « Taha », joué déjà lors de 500 représentations.
Comment avez-vous découvert Taha Muhammad Ali ?
Après des problèmes de santé, j’ai souhaité partir en Israël où j’ai quelques origines, pour y trouver plus de sens dans ma vie. Je me suis rendu à l’Institut français de Jérusalem et j’y ai rencontré par hasard une amie. Elle m’a invité dans un théâtre palestinien. J’ai pu découvrir la vie et les oeuvres de Taha pour la première fois. On parlait d’Israël et de la Palestine avec le prisme de la sensibilité d’un homme, universel, avec un parcours semé d’embûches et de tragédies. J’ai trouvé que cela avait beaucoup de sens. Cet homme redonne une humanité.
Lorsque je l’ai découvert, pour moi tout s’éclairait. Cela faisait écho à certains récits personnels et familiaux. Il y avait une urgence à dire le personnage, à lire le texte.
En quoi la découverte de Taha a été une révélation pour vous ?
Pour moi, il y a eu trois révélations. D’abord, j’ai mesuré à quel point son histoire était structurelle, qu’elle en disait beaucoup sur le monde, sur l’impuissance à combattre contre le puissant. Deuxièmement, avec la force des mots de Taha c’est la possibilité de les jouer au théâtre. À travers un monologue, il nous partage une simplicité, une émotion, une justesse. C’est véritablement une source d’inspiration. Et troisièmement, ce spectacle c’est le symbole de l’homme qui se transforme grâce à la poésie. Il nous partage ses souffrances par les mots.
Que diriez-vous aux lecteur·rice·s pour les inciter à voir le spectacle ?
Au spectateur qui souhaite venir, je lui dirais que c’est un spectacle nécessaire et ouvert à tout le monde [NDLR à partir de 13 ans]. C’est quelque chose qui nous dépasse. C’est un voyage. Il ne s’agit pas moins de connaître le personnage que de connaître son œuvre. Au cours du
spectacle, on assiste à un parcours unique où le lecteur passionné que représente Taha se transforme en auteur.
Il y a une communion avec le public. En tout cas, j’essaie d’être à la hauteur et de servir les mots de Taha sincèrement avec mon cœur.
Je suis sensible et admiratif de la poésie arabe. Je remarque qu’il y a une vraie émotion parmi le public arabophone. Il y a un rapport à la langue
qui est profond.
Je ne considère pas le spectacle comme ayant directement une portée politique. Il y a une remise en perspective de l’histoire israélo-palestinienne,
d’où découle des constats. C’est un texte extérieur mais actif.
J’espère que dans 10 ans je continuerai de jouer ce texte fabuleux.
Taha Muhammad Ali est né en 1931 et décède en 2011. Il est l’un des plus grands poètes palestiniens de l’époque contemporaine. Alors âgé de dix-sept ans, il émigre au Liban à la suite de l’attaque de son village. Il s’installe définitivement à Nazareth jusqu’à sa mort où il tient une boutique de souvenirs. Il traduit les expériences de sa vie en poésies.